Dans Ouest France à propos d'Et qu'on m'emporte

Ouest France, le 22/04/09

« Quelle ironie, n’est-ce pas? Me voilà couchée sur le dernier lit, clouée devrais-je dire : plus jamais debout vive à me mouvoir ni désirer ni frémir… » Emma se meurt d’un cancer. elle qui a toujours privilégié son plaisir, au point d’abandonner sa fille d’un premier lit, songe à celle-ci, disparue de la même maladie après une vie d’errance. Entre les visites de son mari, Rolland, les soins de son aide-soignante qu’elle ne ménage pas, elle parle à cette enfant qu’elle n’a pas vue grandir, ni vieillir. Elle lui explique, sans éprouver de regrets, pourquoi elle a choisi la liberté après avoir connu, petite, la guerre et l’étoile jaune.

Carole Zalberg  (auteur de La Mère horizontale) réussit le portrait sans concession d’une femme forte, à la fois très égoïste et très humaine, qui regarde la mort et son passé en face. A la fois glaçant… et rassurant.

Frédérique Bréhaut à propos d'Et qu'on m'emporte dans Courrier de l'Ouest

Courrier de l’Ouest Dimanche

Le 29/03/2009

Notre sélection de la semaine

Les petits cailloux

Loin de s’adoucir à l’approche de sa fin, Emma se confesse avec toute la rugosité dont elle est capable. Les vents libertaires de Mai 68 ont incité cette amoureuse à quitter ses enfants. Ses filles ne s’en relèveront pas. L’une abdique dans le refuge d’une folie douce, l’autre se venge dans les vertiges d’expériences destructrices. Carole Zalberg poursuit une âpre chronique familiale. Cette radicalité donne toute sa force à ce court roman où la plume sèche assassine les sentiments. Le souvenir d’un caillou rose suffit alors à faire boiter une indifférence moins féroce qu’il n’y paraît. Mais il est trop tard.

Frédérique Bréhaut

A propos d'Et qu'on m'emporte dans La Gazette économique et culturelle du Languedoc-Roussillon

Histoires de « mauvaises mères »

Incantation lucide d’une femme à l’agonie qui s’adresse au fantôme de sa fille qu’elle n’a pas su aimer, « Et qu’on m’emporte » est le second volet de « La trilogies des tombeaux ». Un roman sombre et obsédant.

Il y a la mort qui rode et une femme sur son lit d’agonie qui parle à un fantôme. Second volet d’une trilogie dédiée au désamour maternel (« La Trilogie des tombeaux »), « Et qu’on m’emporte » remonte dans le temps et donne la parole à Emma, la grand-mère de Fleur. Fleur, c’était l’héroïne impuissante de « La Mère horizontale », premier pan de la trilogie. Elle y évoquait sa mère, Sabine, celle dont elle ne gardait que des « souvenirs horizontaux » : « Je n’ai de ma mère que des souvenirs horizontaux. Je ne la vois guère que couchée, étendue, jetée à terre. Je ne me la rappelle qu’échouée. »

C’est à Sabine qu’Emma s’adresse avant de mourir. sabine, sa fille morte avant elle, celle qu’elle a délibérément exilée de son cœur. Une incantation lucide et sans pathos qui s’élève du roman de Carole Zalberg comme une mélopée obsédante. « Je me tairai bientôt, moi aussi, avec mes secrets de soleil et de tumeur mêlés, mais ça n’échangera pas ma vie contre la tienne. Je te parle, je te parle. » Emma ne cherche pas à justifier son refus d’amour mais à l’expliquer. Alors elle « fouille » le passé, »brasse » les éléments de sa vie qui l’ont amenée à choisir un homme « contre ses premiers enfants ». Thibault, Caroline et Sabine. Ceux qu’elle a eus avec Max, qu’elle a « laissés en plan sans y réfléchir à deux fois » parce qu’ils n’étaient que du « lest à lâcher pour aller plus haut ». Pas la fibre maternelle Emma? « Je n’ai pas eu le temps d’aimer vraiment mes premiers-nés. Ils m’ont tout de suite encombrée. C’est terrible à dire mais je les ai faits comme une poule des œufs. pas concernée plus que ça. N’attendant que le moment où ils iraient volet ailleurs ». Et au final, elle est partie avant eux, les abandonnant à leur père au profit de Rolland, le nouveau venu de sa vie.

Il faut dire que la grande Histoire a aussi sa part de responsabilité. Emma a 31 ans en 1968. Sa soif de plaisir ne supporte aucune entrave. Surtout pas celle d’un enfant. Alors elle préfère les repousser. Tous. Sabine. Thibault le « pisseux, merdeux ou morveux. » Caroline « cette pauvre grosse fille ». tous sauf Tom, le dernier né, issu de sa relation avec Rolland. « J’en ai fait mon oeuvre et ma mission, de cet enfant. Un monument dédié à cette Terre promise où je tournais maintenant en rond, le monde de Rolland, mon monde à présent ».

Seule chose qu’elle ne pouvait prévoir c’est qu’à l’heure de sa mort, le souvenir de sa première fille, Sabine, allait lui revenir en pleine face, dans sa « chair » et dans ses « moindres pensées »…

Le roman de Carole Zalberg a cette puissance qu’ont les chants sombres et tristes qui touchent au coeur de l’humain. Il rappelle avec subtilité que l’amour maternel, derrière l’hypocrisie sociale, n’est pas une donnée absolue. pas plus que l’instinct maternel. Le monologue d’Emma en fournit la preuve avec une justesse de ton qui démontre le talent de son auteur.

Carole Zalberg dit souffrir d’un « complexe d’usurpation » quand elle décline son statut d’écrivain. « Et qu’on m’emporte » est la preuve magistrale du contraire.

Le 03/03/09, La Gazette économique et culturelle du Languedoc-Roussillon.

La Mère horizontale et Et qu'on m'emporte coup de coeur d'Amélie Nothomb

Le coup de cœur d’Amélie Nothomb dans Service Littéraire, le mensuel de l’actualité romanesque, dirigé par François Cérésa. Avril 2009.

Service Litteraire Amelie Nothomb

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Le site du journal : http://www.servicelitteraire.fr