La bohème corse
Le décor évoque Mérimée, mais les ambiances sont toutes personnelles. Dans son minuscule dernier opus, Carole Zalberg retrace les épisodes sentimentaux qui, au détour d’une tranche de vie de bohème en Corse, ont forgé la vocation d’une femme écrivain.
Il s’en dégage l’esprit romantique inhérent à tout amour illégitime avec un bandit corse. Dans les atours modernes de cette nouvelle, son nom est «Le Matou» et son style bravache s’exprime dans un caveau de jazz où jouent des musiciens surdoués, fantômes presque anonymes. On y déguste «la pasta», spécialité au goût d’interdit, dont le lecteur, hôte privilégié, goûtera quelques effluves.
La narratrice ne juge pas, quitte à ce que son propos semble amoral, par exemple lorsque sont évoqués les hommes qui se sont succédé dans son lit: «Surtout ne pas compter», confesse-t-elle. Un flou artistique entoure les interactions entre personnages, campées quant à elles avec la précision de phrases courtes dont on ne fait qu’une bouchée. Ainsi évolue un monde d’ombres en phase avec les illustrations faussement tranquilles de Denis Deprez, qui donnent à ce livre un supplément de chair. DF