Quoique me risquant depuis quelques temps à tutoyer la vocation d’auteur, je reste un simple lecteur. Pas un grand lecteur. Je lis peu, car très lentement. Mais un lecteur que les mots, les beaux, les forts, les purs, emportent aisément. C’est ce qu’il m’est arrivé à la lecture du dernier, beau, fort et pur, roman de Carole Zalberg. Coïncidemment titré « Et qu’on m’emporte ».
Je ne vais pas m’étendre sur le fond. D’autres que moi s’en sont acquittés. Mieux que je ne saurais le faire. Ce qui m’impressionne par dessus tout chez Carole, c’est la forme. La force tranquille, pardonnez cette déjà désuète référence, de son style. Sa capacité à dire tout avec si peu. A manier l’ellipse comme un peintre manie le clair-obscur. A raconter une histoire par petites touches. Sans qu’aucun des traits, des aplats, des couleurs, des ombres qu’elle choisit de combiner ne paraisse de trop. Carole Zalberg ne cherche pas le joli mot, elle cherche le mot juste, celui qui traduira le plus précisément l’émotion qu’elle souhaite faire passer. Et ça fonctionne du feu de Dieu.
Dès les premières pages du roman, on sait ce qu’il va advenir de son personnage principal, Emma, mère indigne qui s’assume comme telle. Mais on ne sait pas encore de quelle manière Carole Zalberg va nous le faire ressentir.
C’est un peu comme d’écouter pour la première fois un morceau de rock progressif. On sait pertinemment que chaque note, chaque instrument, chaque progression d’accord tend vers un instant d’explosion qui ne durera peut-être que quelques secondes mais qui nous arrachera malgré tout mille frissons.
Lorsque cet instant arrive, dans le roman de Carole, ses mots prennent une dimension émotionnelle qu’il est en effet plus facile de rencontrer en musique qu’en littérature.
C’est suffisamment rare, trop rare même, pour mériter d’être lu, vécu, aimé, partagé.
Merci Carole…
Arnaud Huber
Article publié Là le 24 03 09