Compte-rendu de la soirée du 13 janvier 2011

Résistances

à la fin

photos Jean-Paul Dayan

présentationJe vous dois la vérité : je ne vais pas prétendre que j’ai conçu cette soirée autour d’un thème commun.  En fait, dès le mois de mai, j’ai su que trois des auteurs que j’avais déjà reçus ici et dont le travail m’intéresse tout particulièrement publiaient en septembre. J’avais évidemment envie de les inviter mais trois auteurs, cela occupait trois mois de rencontres. ça laissait peu de place pour de nouvelles découvertes. Frédérique, avec qui je discutais de ce dilemme, m’a dit «tu n’as qu’à les inviter ensemble ! » et voilà. C’est vrai que c’était évident. Bon ça a été plus compliqué que prévu à mettre en place mais enfin, nous y sommes. Donc à l’époque, je n’avais lu que le Ferrari, qui m’avait bouleversée. Je connaissais vaguement le sujet du Kuperman mais je n’avais aucune idée de la façon dont elle l’avait abordé, et je ne savais rien sur le Hochet, qui est toujours très secrète.
La divine surprise, ça a été la découverte des titres qui, en plus d’être sublimes, reflètent une interrogation partagée sur ce qui fait l’Homme.
Et il est bien question de ça dans ces trois romans. A la lecture, bien sûr, le sujet commun qui saute aux yeux, c’est la violence : la violence en entreprise chez Nathalie Kuperman et donc celle de la société qui la produit, la violence politique et adolescente chez Stéphanie Hochet et la violence autorisée des temps de guerre chez Jérôme Ferrari. Mais finalement, il est aussi et heureusement question de résistance dans ces plongées en eaux troubles. La résistance active, concrète, par exemple d’une Ariane Stein décidant dans Nous étions des êtres vivants, d’investir physiquement avant de le perdre le lieu de son travail, d’y laisser sa trace, dans La Distribution des lumières celle de Pasquale au moyen de l’exil puis mentale, du fond de son enfermement ou encore celle d’Aurèle qui résiste au sordide de son milieu avec sa seule arme : son intelligence, dans Où j’ai laissé mon âme la résistance de Degorce pendant l’Occupation et de Tahar, bien sûr, face à l’armée française. Mais surtout, il me semble que ces trois textes tiennent droit et sont puissants parce que ce que vous allez chercher tous les trois, c’est ce qui, en l’homme, est irréductible. D’accord, vous mettez les mains dans le cambouis, mais c’est pour en rapporter une chose essentielle, une sorte de noyau : cette part de l’homme qui résiste, qu’elle se révèle humaine, ou, comme, tu le suggères Jérôme, qu’elle ne le soit pas. Mais on y reviendra.
Je vais commencer par présenter le livre de Nathalie, dont le roman se déroule au plus près de nous en termes d’actualité comme de géographie. Elle nous lira un extrait et on discutera ensuite. Puis ce sera le tour de Stéphanie, puis de Jérôme, toujours selon le même principe. Et surtout n’hésitez pas à intervenir.

dans la salle

Nathalie écouteDans l’écume des jours

Le nouveau roman de Nathalie Kuperman s’annonce moins décalé et intimiste que les précédents. Nous étions des êtres vivants retrace en effet ce temps terrible où une entreprise attend d’être liquidée ou reprise. On est donc là face à l’un de ces sujets réalistes et sensibles qui occupent, à juste titre, les unes de nos journaux autant que les esprits et les conversations. Pourtant, c’est bien l’écrivain de l’invisible et des ombres que l’on retrouve ici avec émotion.
Nathalie Kuperman, fort heureusement, ne traite pas son sujet. Elle le laisse monter, telle une précipitation qu’elle seule sait provoquer. C’est ce qui touche si juste et profond. On aborde ce texte empli d’appréhension. Il va être question de violence en entreprise, d’êtres broyés par le système, d’exercice abusif du pouvoir, toutes choses d’autant plus familières qu’elles nous parlent d’un monde où l’on doit vivre. Or l’installation – c’est le mot qui vient, comme pour le travail d’une Sophie Calle ou d’un Boltanski utilisant détails et décor, attentifs à ce qu’on pourrait appeler la configuration des vies – de Kuperman n’a pas pour effet immédiat de nous horrifier.
En donnant voix non seulement à quelques-uns des salariés menacés par les diverses conséquences d’un rachat froidement financier mais aussi à ce chœur qui serait en quelque sorte l’âme de l’entreprise si toutefois elle en possédait une, Kuperman nous intéresse d’abord aux personnalités, aux travers et aux manies, aux failles et aux peurs derrière les apparences de compétence, de jovialité, d’assurance. Les personnages saisis dans leur intimité – mère célibataire luttant pour ne pas perdre l’admiration de ses enfants, cadre supérieure impuissante face à l’Alzheimer de son père, vieille fille folle d’habitudes – témoignent avant tout de l’universelle solitude humaine, de ce besoin de consolation que Stig Dagerman disait impossible à rassasier. Jusqu’ici, tout va bien, se répète-t-on vaguement surpris et plutôt soulagé. On suit et compatit sans effroi.
Puis la précipitation a lieu au détour d’une phrase ici ou là – celle magnifique du titre ou encore ce « retourner à l’espoir n’était pas chose simple » ˗ , d’une péripétie, telle la découverte par Ariane Stein de ce document terrible où le repreneur, Paul Cathéter, a consigné sans états d’âme le destin de cette simple ressource qu’est pour lui l’humain. C’est ainsi que nait le saisissement et, avec lui, un incommensurable chagrin.
Nous étions des êtres vivants n’est pourtant pas un roman désespérant. Il y est aussi question de courage et de résistance, de la manière dont l’adversité, parfois, réinvente les individus et jusqu’au lien entre eux. Il y est question des êtres vivants qui, parce qu’ils peuvent rire, pleurer, se mettre en colère, contrairement aux simples ressources, ne sont sans doute pas près de se laisser tarir.

Nous étions des êtres vivants, Nathalie Kuperman, Gallimard, 2010, 203 p. 16,90 €

Article paru dans Le Magazine des livres.

Stéphanie lit

Chacun cherche son crime

Plusieurs lieux et voix se mêlent, dans le nouveau roman de Stéphanie Hochet : lieux habités ou quittés, voix entendues ou fantasmées. Le tout compose un paysage romanesque aux frontières mouvantes.
Offrant une première interprétation de son très beau titre, l’écrivaine met successivement en lumière ses quatre personnages ; trois des quatre plutôt, l’un d’eux, Anna, n’étant jamais éclairé qu’indirectement, par le regard ébloui des trois autres.
La première apparition – très brève mais il y en aura d’autres –, est celle d’Aurèle, adolescente monstre telle que  les affectionne Hochet. Elle ouvre le récit par une ode à Anna, ou plus exactement au nom d’Anna et dans ce déplacement, on sent aussitôt qu’Aurèle est de ces êtres qui dérobent, investissent réinventent l’objet de leur désir et, fatalement, le nient. L’annihilent. La menace est tapie dans ce début fiévreux, splendide.
Pasquale est à son tour convoqué dans le cercle lumineux. Se déploie avec lui l’un des thèmes du roman : le rapport paradoxal, chargé de culpabilité qu’entretient cet Italien cultivé, délicat avec sa terre natale. Dans ses réflexions sur la façon dont Berlusconi, qu’il exècre, avilit  le pays que Pasquale a préféré quitter, le langage occupe une place essentielle – celle, on le devine, que lui accorde l’écrivaine, ici fine observatrice des mœurs politiques contemporaines. On s’interroge aussi à travers lui sur l’opportunité de résister sur le lieu du crime quitte à en être souillé, ou de partir et s’interdire, du coup, toute autre intervention que l’observation et une critique comme diluée par la distance. Pasquale, qui n’a pas divorcé de son épouse italienne (pour rester arrimé, par ce lien officiel, à son pays et donc à son identité première ?) est épris d’Anna. Il est le deuxième personnage que Stéphanie Hochet place en gravitation autour de la jeune professeur de musique aux cheveux de soleil.
Quand on entre dans la tête de Jérôme, le frère lent d’Aurèle, on en a appris un peu plus sur l’adolescente. On sait qu’Anna est son professeur. Qu’elle en est amoureuse ou, en tout cas, obsédée et l’on pressent que cette obsession va constituer un danger pour Anna comme pour Pasquale. Or dès les premiers mots de Jérôme, on comprend que lui aussi est au bord d’un péril. Le jeune homme, grossier par innocence (en opposition à un Berlusconi grossier par inculture et par choix) est devenu avec les années une sorte de prolongement de sa sœur. A l’heure de la distribution, il n’a pas reçu les lumières de l’esprit. Il est en quelque sorte indéfini et Aurèle peut donc déverser en lui à sa guise tout ce qui, chez elle, menace de déborder. Ainsi, elle lui insuffle le désir qu’elle a de toucher Anna, de la posséder, de lui faire mal, aussi, puisqu’elle s’est donnée à un autre. Jusqu’au jour où Aurèle, volontairement ou pas, sème une graine de drame en évoquant la possibilité d’un crime. Car Jérôme est poreux. Son imagination sans cesse irriguée par Aurèle le ballotte entre hommes et femmes, entre victimes et proies, l’emporte dans des voyages intérieurs hallucinés, le corps lourd d’effroi et de plaisir.
Aurèle sait-elle ce qu’elle manipule, elle qui n’a pas été « éclairée » par des parents trop occupés d’eux-mêmes ? Enfant condamnée à l’invisibilité, elle a tôt fait d’en découvrir le pouvoir : celui d’agir sans que rien du réel, en apparence, ne soit changé, le seul objectif étant une satisfaction personnelle et immédiate. Très rapidement périssable. C’est donc le pouvoir d’être follement libre. Douloureusement aussi. Comment se construire quand on est si peu ou si mal gouverné ? Comment tisser un lien social responsable quand on n’a pas appris à attendre des autres ni à donner ? Dans un tel vide, seule la souffrance vécue ou infligée fait vibrer. Ancre au monde, aussi violent soit-il.
Avec ce roman subtil à l’écriture toujours aussi tendue, Stéphanie Hochet tente une fois encore d’éclairer le mal dans son effroyable banalité. Elle y parvient sans fanfare, sans jamais hausser le ton, grâce à une impeccable distribution des lumières.

La distribution des lumières, Stéphanie Hochet, Flammarion.

Le site de Stéphanie Hochet

Article à paraître dans La Revue Littéraire.

jérôme souritLa fin et les moyens

Jérôme Ferrari est un mineur de fond. Livre après livre il descend vers l’obscur, éclaire, paré de sa langue lumineuse et de sa compassion, les zones reculées où se cache le cœur de l’homme. On l’imagine écrire sous la dictée d’une fièvre, celle de creuser et creuser encore à la recherche de la vérité dans sa gangue de discours, de théories ou d’illusions.
Où j’ai laissé mon âme est, pour l’essentiel, un huis clos situé à Alger en 1957. Le capitaine André Degorce, ancien résistant déporté à 18 ans, détenu en Indochine, officier décoré, pratique la torture pour une cause qu’il veut croire juste. Après Buchenwald, ni la beauté des mathématiques, pour lesquels il était doué, ni une quelconque forme de légèreté n’étaient envisageables. Il s’est engagé non par désir d’en découdre mais, très sincèrement, pour maintenir autant que possible le mal hors du monde où il avait décidé de continuer malgré tout à vivre. Or dans ce bâtiment isolé où œuvre l’armée française, le mal circule, banal, brouillant les frontières entre victimes et bourreaux. Organisé, logique, Degorce s’accommode de ses actes en s’accrochant à leur nécessité. Certes une voix intérieure, lucide et lancinante, déchire par moments le cocon d’efficacité et de rigueur où il se réfugie pour ne pas se haïr. Pourtant les jours et les nuits s’accumulent, apportant leur lot de renseignements arrachés, de victoires à des lieues de la gloire des combats, et, sans être serein, le capitaine Degorce joue son rôle, ne sombre pas dans la folie.
Le roman le met en présence de deux frères d’armes, l’un de son camp, l’autre ennemi. Mais ces nuances n’ont plus cours lorsqu’on est à ce point familier de l’horreur, lorsque c’est elle qui relie. Doublant le récit par son monologue hanté, il y a le lieutenant Andreani, exécuteur impitoyable de basses œuvres, être tout d’un bloc autrefois révélé par un crime. Lui sait où son âme est restée. Elle a fini depuis longtemps de l’encombrer. Andreani est animé par une sorte de foi brutale en la beauté de sa mission. Compagnon de batailles et de détention de Degorce en Indochine, il lui pardonne d’autant moins ses  signes de faiblesse – qu’on pourrait qualifier d’humanité – qu’il l’a adulé. Andreani est à la fois la conscience implacable de Degorce, sa mémoire trop précise et un miroir incassable et grossissant. Quant à Tahar, le commandant de l’ALN, ce visage tout en haut de l’organigramme, une fois pris – incarcéré et brusquement incarné, donc –, il prive Degorce d’un objectif tolérable, l’oblige à des justifications morales qui toujours se dérobent.. Auprès de ce prisonnier calme et digne, apparemment sûr, lui, de la justesse de sa lutte et des moyens que, dit-il, on l’oblige à employer, le capitaine trouvera le répit. Sans doute imagine-t-il que Tahar seul peut le comprendre. Sans doute espère-t-il obtenir son pardon. C’est sans compter sur les rouages d’un système qui doit sa survie au mensonge et à la destruction des traces.
Jamais complaisant mais précis et inspiré, Ferrari nous enferme avec lui dans des geôles où le pire se déchaîne, où le peu de lumière vient des sursauts de l’âme humaine. Elle éclate quand un homme torturé et humilié trouve le courage de se donner la mort. Elle luit dans le regard bienveillant que pose Tahar sur son bourreau. Elle est presque aveuglante dans l’écriture haletante de Ferrari, ce flot lourd et puissant qu’on lui connaissait et qu’on retrouve ici comme un lieu de douleur et d’émotion. Car il sait ce qu’il y a dans l’homme et c’est ce qu’il écrit.

Où j’ai laissé mon âme, Jérôme Ferrari, Actes Sud, 2010, 154 p, 17€.

Article paru dans Le Magazine des livres


devant la librairie

A propos de "Nous étions des êtres vivants", de Nathalie Kuperman

Dans l’écume des jours*

Le nouveau roman de Nathalie Kuperman s’annonce moins décalé et intimiste que les précédents. Nous étions des êtres vivants retrace en effet ce temps terrible où une entreprise attend d’être liquidée ou reprise. On est donc là face à l’un de ces sujets réalistes et sensibles qui occupent, à juste titre, les unes de nos journaux autant que les esprits et les conversations. Pourtant, c’est bien l’écrivain de l’invisible et des ombres que l’on retrouve ici avec émotion.
Nathalie Kuperman, fort heureusement, ne traite pas son sujet. Elle le laisse monter, telle une précipitation qu’elle seule sait provoquer. C’est ce qui touche si juste et profond. On aborde ce texte empli d’appréhension. Il va être question de violence en entreprise, d’êtres broyés par le système, d’exercice abusif du pouvoir, toutes choses d’autant plus familières qu’elles nous parlent d’un monde où l’on doit vivre. Or l’installation – c’est le mot qui vient, comme pour le travail d’une Sophie Calle ou d’un Boltanski utilisant détails et décor, attentifs à ce qu’on pourrait appeler la configuration des vies – de Kuperman n’a pas pour effet immédiat de nous horrifier.
En donnant voix non seulement à quelques-uns des salariés menacés par les diverses conséquences d’un rachat froidement financier mais aussi à ce chœur qui serait en quelque sorte l’âme de l’entreprise si toutefois elle en possédait une, Kuperman nous intéresse d’abord aux personnalités, aux travers et aux manies, aux failles et aux peurs derrière les apparences de compétence, de jovialité, d’assurance. Les personnages saisis dans leur intimité – mère célibataire luttant pour ne pas perdre l’admiration de ses enfants, cadre supérieure impuissante face à l’Alzheimer de son père, vieille fille folle d’habitudes – témoignent avant tout de l’universelle solitude humaine, de ce besoin de consolation que Stig Dagerman disait impossible à rassasier. Jusqu’ici, tout va bien, se répète-t-on vaguement surpris et plutôt soulagé. On suit et compatit sans effroi.
Puis la précipitation a lieu au détour d’une phrase ici ou là – celle magnifique du titre ou encore ce « retourner à l’espoir n’était pas chose simple » ˗ , d’une péripétie, telle la découverte par Ariane Stein de ce document terrible où le repreneur, Paul Cathéter, a consigné sans états d’âme le destin de cette simple ressource qu’est pour lui l’humain. C’est ainsi que nait le saisissement et, avec lui, un incommensurable chagrin.
Nous étions des êtres vivants n’est pourtant pas un roman désespérant. Il y est aussi question de courage et de résistance, de la manière dont l’adversité, parfois, réinvente les individus et jusqu’au lien entre eux. Il y est question des êtres vivants qui, parce qu’ils peuvent rire, pleurer, se mettre en colère, contrairement aux simples ressources, ne sont sans doute pas près de se laisser tarir.

Nous étions des êtres vivants, Nathalie Kuperman, Gallimard, 2010.

* article paru dans le Magazine des livres de septembre

A propos de Petit déjeuner avec Mick Jagger, de Nathalie Kuperman

A propos de Petit déjeuner avec Mick Jagger, Nathalie Kuperman, L’Olivier, 2008.

La possibilité de Mick

Les romans de Nathalie Kuperman me font penser à ce qui guette de l’autre côté du mur quand on habite en haut d’une tour : la menace du vide. Cette menace est constante mais il faut se pencher par la fenêtre pour en percevoir la réalité. De la même manière,  Petit déjeuner avec Mick Jagger recèle mille dangers,  s’ouvre sur quantité de souffrances et de cris, mais si l’on veut les saisir,  il faudra  en quelque sorte traverser les phrases précises de Kuperman jusqu’à cet espace où plus rien n’est sûr ; il faudra accepter de suivre l’auteur dans un monde  où réel et imaginaire sont les fils tissés très serrés d’une trame unique ; il faudra renoncer à les démêler, ces fils, puisque dans leur enchevêtrement ils sont la matière même du récit et sa beauté ; il faudra accepter le vertige.

C’est alors seulement qu’on se tiendra avec émotion parmi les ombres qui hantent ce court roman aussi faussement léger que les précédents. On sentira l’absence floue d’une mère, sa folie jamais nommée, on assistera, empli d’une inutile rage, au viol subi par la narratrice à  huit ans,  on constatera la fuite du père dont les paroles d’amour ne parviennent pas à remplacer l’amour lui-même, qui serait d’être là pour son enfant. On saura qu’on est remonté à l’origine des maux quand on verra se diffuser le poison de la persécution.  Témoin ou conteuse,  Kuperman  écrit très précisément ces ombres et cela suffit à notre douleur.

Bienheureusement, Mick nous est donné.  Il est notre refuge autant que celui de Nathalie. Ses chansons des repères, une collection commune et vibrante à laquelle puiser pour se divertir et exulter. Aucune autre rock star n’aurait fait l’affaire. Il fallait Jagger et son hypersexualité qui, par un de ces miracles paradoxaux dont l’auteur a le secret, lave des souillures  et rachète tous les hommes ou presque. Il est un ange gardien déglingué qui oublie souvent de veiller. Un héros très imparfait rendant moins criante l’imperfection des êtres chers.  Il est l’expression même de la solitude et son antidote : l’imaginaire, l’invention d’une vie désirable. Il est l’écriture, donc, qui tient en vie tout en nous séparant du monde.

© Carole Zalberg

Je recevrai Nathalie Kuperman le jeudi 7 mai à 19h30 à la libraire La Terrasse de Gutenberg (cf la rubrique Agenda)